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Wilhelm Von Goldmund

Aristocratie du Vide & Sciences Exactes de l'Echec

Je Vous Attends

Je Vous Attends

Mes pauvres amis. Nos misères se crachent dans les postiches décadents que nous-nous envoyons au marteau. Ne me dites pas que je vous ai atteints, que j’ai su aborder à vos rivages clairs avec ma lèpre et mon halo. Allô ? Envoyez-moi ailleurs. Allô ! Faites-moi décoller dans des talonnades où je ne pourrais plus faire de tort qu’à moi-même. Sous la coupe des cartes transparentes nos déraisons filent bras collés / bras décollés comme des crêpes antidérapantes pour souliers jamais assez vernis. Nos tontes, nos malaises malicieux, glissent comme des larmes en porte à faux, comme des cintres excentrés qui ne supportent que nos peaux mortes.

Je veux donner aux cieux la couleur de la terre mêlée à l’eau, et tout mélanger comme dans une poterie pour nourrisson frigide, toujours râleur, jamais à l’heure. Peindre le réel couleur glaise panique. Toujours sur la margelle du puits. Dans le blizzard des silences corrompus se traînent des processions de hauts le cœur. L’animalité se refait une santé dans la douille redessinée de ma petite boîte à sucre. Ma poudrière en guise de loup, ma meurtrière pour toute collerette, et ma hallebarde hérissée de cartes de vœux en décomposition : je suis fin prêt pour l’assaut de nos sbires. Des repaires non repérables trouent la nuit de leurs chandelles, et ponctuent l’étoffe brisée de leurs milles espoirs.

Dans vos tombes, sous vos stèles dont les épitaphes dégueulent jusqu'au ruisseau, vous ferez la bringue à coup de terreau. Vous croirez voir des spasmes de plaisir dans les anneaux des vers, mais ce ne sera que leurre et verroterie. Vous verrez se briser sur vos coquilles de neufs des projectiles fulgurants maquillés en utopies. Et vous déraillerez, pas comme moi, non, pas comme moi. Dans les rails ! Vous déraillerez autre, car tout est autre, tout est autrement. Il n’y a jamais eu d’unité, il n’y a que l’infini constellé d’équations à milliards d’inconnus. Puis je vous reverrai lumière, je vous reverrai enfin libres, enfin justes. Vous prendrez les touches blanches, je prendrai toutes les autres. Vous êtes gonflés. On se revoit toujours, hein ? On se revoit quand même...

Et on se ment par excès d’humanité, on se pare des mauvaises nippes, celles faciles du coffre à jouet, celles difficiles du coffret muet. Chez moi, vous êtes chez vous. Mais faites attention : chez moi il n’y a plus personne et la vermine se nourrit de renfermé. Armez-vous, puis prenez vos aises, découvrez le rai de lune sous la crasse... si vous le voulez toutefois. Rien n’est obligatoire, surtout là-bas. Et puis vous-vous rendrez compte que les murs sont transparence, infondés, et finalement indistincts comme des arcs sans couleur. Au centre, vous aviserez un fauteuil et vous-vous y vautrerez. Les pieds de ce fauteuil auront leurs bulbes dans ma gorge.

Et quand me prendra l’envie de crier, vous basculerez pour de bon dans le coffre à jouet. Et je me draperai de vous, comme une serviette humide épouse le visage de la vieille trop massée, trop flasque et trop informe pour prêter à sourire. Vous deviendrez un déguisement emboîté. Vous serez ma terreur décanillée de bonne fin de nuit.

Simplement pour le coup de jus, ça vaudra la peine. Simplement pour le coup de bourre dans la déchirure, ça vaudra le coup de jeune. Simplement pour la pluie dans les strates de mes vallons, ça vaudra votre amertume et ça me coûtera la peau des poumons. Simplement pour la recherche de ce portrait largué aux confluents de la sanguinolence, ce portrait que je veux montrer depuis le jardin jusqu’aux voûtes. Simplement pour la raide descente en piqué sur des plages ensommeillées où seules les ombrelles prennent le soleil, molles et alourdies de bourdes et de déclamations.

Sous la coupe des cartes, un nouveau fuseau horaire : le « plus le temps du tout » ! Les oiseaux blessés tournent en rond en cherchant leur vol, et volent leurs miettes au magasin des quêtes de raison. Ils se soigneront, leurs pattes prendront de l’ampleur... et finiront ancres dans une baie désinfectée. Les ombrelles applaudiront avec les cintres et le rideau tombera, décroché de honte. Ne nous laissez pas voir ça. Cachez-nous. Dans une besace à flanc de côte, dans une épuisette de combat, dans un panier de crabes au sourire pincé, peu importe. Cachez-moi derrière vos masques d’arcs en ciel, si bien répétés que la seule fausse note proviendra d’une moucheture de vertige. Si au-delà des limbes et des gouffres creux qui nous montent à la tête se tient un lieu offert comme une robe sous l’alcool, nous devons y grimper humblement, saut à saut, goutte à goutte. Ensemble.

Au sommet de la décennie décatie, fin de ce siècle moisi de sourires, nous jetterons nos drapeaux transparents qui s’élèveront toujours plus en bas. Ce bas qu’ils collent autour des femmes pour leur faire baisser le menton. Ce bas qui pend de leurs soupirs quand ils s’endorment repus de ferronnerie. Le fétichisme des masses, c’est le fer. Le fer du cadenas qui bloque à satiété le circuit de verrous qui leur tient lieu de veines. Nous les ferons rouiller, ces artisans de la métallerie sur tapis croulant. Les ferrures dentelées des poses amoureuses et des rires à engrenages se débloqueront enfin. Et les traces de ce monde pendu par la queue mourront dans des flacons stupéfaits.

Un grand éclat de rire d’enfant fera son chemin dans tous les cieux de tous les clochers de tous les carillons, et ce sera LA VÉRITÉ sonnant les douze coups de l’envie. Et loin des blocs de suie, ce sera la réouverture du soleil à prix bradé au plus juste, au ras de l’azur. Et mon autisme, et votre fougue, seront nos bénédictions pour l’âge où les splendeurs de la possibilité se déclineront en stratosphères. Et il y aura la place, toute la place, enfin veloutée et somptueuse, pour tous les Enfants-loups, ces petits abhorrés qu’on montre sur toutes les places publiques aux bons yeux du bon peuple crevé d’abnégation. Le cirque échafaudé sur des pardons impardonnables prendra fin dans des tonalités caustiques. A ces enfants condamnés, nous fournirons des crocs indémodables et vrais comme le printemps : ils repousseront toujours.

Et les faibles ne seront plus affabulés, mais attablés à notre pain de songe. Et nous nous gaverons les uns et les autres de nos splendeurs. Le présent sera redevenu maintenant et l’avenir une fuite dans ces étoiles que nous aurons nous-mêmes, insolemment seuls, brodées au rideau de l'infini. Avec des points de croix. Avec des poings de soie, les poings terreux des enfances délabrées.

Des chiens de meute, des chiens entraînés sans même une traîne de rage dans des régions où tout est à construire, tout est à faire, tout est à rêver. Rêvons, mes loups, rêvons de folie fraîche. Je balancerai ma collection sucrée, enfin utilisable, dans les cercles brûlants de nos fièvres velues. Je grave dorénavant vos colonnes.

Je vous attends… Là-bas…

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